La vision de ShivaChris

Le Tantra est un sujet sans limite. C’est difficile d’en parler, car ça ne s’explique pas avec des mots. Ça se transmet de cœur à cœur, ça se transmet dans la présence et dans l’authenticité, dans un vrai contact, dans une connexion à soi et au monde extérieur.

Pourtant, il y a beaucoup de livres qui ont été écrits sur le Tantra. Mais c’est avant tout une expérience à vivre, et ce n’est certainement pas une course à l’orgasme cosmique. Je le souligner ici, parce que l’Occident a pris une toute petite partie du Tantra qui est reliée à la sexualité et en a fait une course à l’orgasme cosmique. Tantra est à l’opposé de la course, de la performance. Le Tantra est simplement une relaxation profonde, une présence de cœur à cœur, dans l’authenticité, à travers le regard, la respiration. Une connexion qui passe par le senti et pas seulement avec un ou une partenaire, mais avec l’univers entier, la nature toute entière et avec tout ce qui nous entoure.

Pour moi, c’est avant tout un art de vivre. C’est un chemin de guérison, de transformation, une alchimie qui passe par le corps. Parce que, pour le Tantra, le creuset alchimique, c’est le corps et ses ressentis. Cette expérience peut être vécue dans le quotidien avec les animaux, les végétaux, les minéraux, les éléments. Par exemple, le vent, les arbres, le ciel, les oiseaux, l’océan. Pour moi, l’espace du Tantra est un espace sans limite. Rejoindre et toucher cet espace, c’est une grâce et un cadeau de la vie.

Heureusement, chaque être humain dans sa vie a des moments de grâce, de pur bonheur, de grande joie. Et ces moments-là n’arrivent pas seulement dans des moments fougueux d’amour, mais aussi dans les désespoirs les plus profonds. C’est au fond d’une nuit noire que très souvent, à ce moment-là, la porte peut s’ouvrir et qu’il est possible de toucher à la lumière.

En Occident, nous avons beaucoup renié la part de l’ombre. Et pourtant, l’ombre est un travail qui concerne aussi le Tantra. Et cette dimension-là est souvent oubliée. On parle de lumière, d’orgasme cosmique, de fusion, mais très peu de l’ombre et de l’importance d’être dans cet équilibre où ombre et lumière vont ensemble. Il n’y a pas de lumière sans la nuit. Le Tantra est cet espace où il est possible de rester dans le centre, notre centre, depuis le regard du témoin qui observe en conscience. Et la possibilité de vivre les deux côtés, parce que la vie nous appelle des deux côtés. Il y a une danse dans l’ombre et une danse dans la lumière. Et pouvoir embrasser les deux côtés pleinement et assumer cette danse pour retrouver le centre.

Dans ma perception et dans mon expérience, parce que c’est seulement de ça que je peux finalement parler, il y a toujours eu un espace à l’intérieur, au centre. Et beaucoup de mystique de toutes les religions, quelles que soient leurs croyances, pointent dans la même direction. Ce centre qui est intouchable et intouché. On parle ici de l’espace du témoin, de la conscience, de Dieu. On peut lui donner n’importe quel nom, car cela n’a au fond pas d’importance. Puisque ce sont des étiquettes. Mais c’est l’expérience de ce centre qui est vraiment le chemin qui nous amène à nous-même et vers cette alchimie intérieure où il est possible d’être en équilibre. Et dans l’espace de ce centre, c’est également le lieu de la guérison. Car de toute façon, toutes les expériences de la vie, même si la vie a été un calvaire, lorsque je suis dans le centre et que je peux regarder à partir de cet espace, la vie est parfaite. Et Dieu sait que nous avons tous traversé des moments difficiles. Je m’aperçois de ce cadeau, même si très tôt, j’ai été en contact avec des expériences compliquées.

Le Tantra, une expérience de la totalité, c’est une expérience de l’être, dans l’essence. Cette essence qui nous relie les uns avec les autres, avec la nature entière, avec tous les êtres qui sentent. Cette expérience doit nous permettre d’aller au-delà des techniques. Cette expérience est une invitation à la foi profonde, comme lorsqu’on attend la personne qu’on rêve d’aimer et qui nous aimera en retour. À cet endroit, j’invite la magie de la Vie et je m’ouvre à l’expérience. J’ouvre mon cœur, j’ouvre dans le senti. Est-ce que mon souhait va se réaliser ? Est-ce que le rdv va avoir lieu ? C’est impossible à savoir et à forcer. C’est une grâce et l’attitude face à cette grâce, c’est d’être humble et de nous mettre à genoux devant la beauté de l’existence. Et d’ouvrir les mains et simplement d’attendre et d’accueillir pleinement ce que la vie nous offrira.

Lorsque l’on parle de relation tantrique, il s’agit de comprendre que la première relation est cette relation d’acceptation et d’amour avec soi-même. Cette capacité à poser un regard bienveillant sur nous-même. Et ce qui nous pousse dans une recherche à l’extérieur, c’est ce manque d’amour fondamental. C’est cette première relation qui nous ramène vers nous-même et vers le centre. Et dans cet espace-là de réconciliation avec un regard bienveillant d’amour pour soi-même, dans ce cœur amoureux qui est dans la plénitude, le rayonnement se fait. Et il y a une ouverture qui se fait. Mais cette ouverture doit venir de l’intérieur. Ce n’est pas quelque chose qui peut être forcé de l’extérieur. Toutes les situations, les séparations, tout ce qui a été vécu à travers nos relations, c’est pour nous éveiller et ouvrir notre cœur. Le cœur a besoin d’être brisé pour s’ouvrir. Et c’est lorsque que nous prenons la responsabilité de prendre soin de notre propre graine que la relation dans le “nous” prend une autre dimension et est réellement possible.

Les émotions dans le Tantra, elles se vivent, elles coulent, elles font parties de la vie, et ces émotions-là, dans le ressenti, c’est le chemin de la transformation, c’est la beauté du Tantra. Parce qu’il y a l’acceptation de tout ce qui est, et les émotions en font partie. Quand elles sont dans le ressenti, elles ouvrent le chemin, que ce soit par exemple les pleurs, les rires, la colère. Car dans chaque émotion, il y a la possibilité de transformation au niveau de la conscience. L’émotion de base qui va avec l’être humain, c’est le rire et les larmes. La colère est une émotion de réaction. Donc lorsque je suis dans mon centre, avec le témoin qui observe, je peux ressentir la colère qui est présente. Mais cette émotion m’invite à m’interroger sur ce qui allume et anime le feu de cette colère. Et le travail qui va être fait à partir du centre, du cœur, c’est de chercher la racine de cette colère. Et donc utiliser chaque situation où la colère émerge comme un miroir pour regarder où est la racine de cette colère, pour pouvoir l’extraire grâce à cette conscience et à l’amour. Et lorsque l’on trouve la racine, la colère se dissout. Pour la dissoudre, il faut aller chercher l’endroit depuis l’espace du cœur.

Dans chaque être humain, il y a un terroriste, un tueur ou une tueuse, parce que cette colère, nous la portons tous. Et renier cela, c’est catastrophique. Cette addiction à la violence qui est partout dans le monde, c’est pour nous rappeler et nous donner le miroir pour que nous puissions aller regarder notre propre destruction et ce terroriste. Parce que c’est toujours ailleurs que ça se passe pour nous en Occident, mais regardons comment ça se passe à l’intérieur de nous-même et dans notre maison. Il y a des colères qui sont conscientes et qui ne sont pas destructrices, et qui offrent, du coup, un moment privilégié, car son énergie est utilisée pour planter la flèche droit au but, là où la conscience peut s’ouvrir, là où la lumière peut se faire.

Les états modifiés de conscience, c’est la santé, c’est la vraie vie. Cette vie qui nous échappe, car nous sommes trop préoccupés par le quotidien et le « petit moi » dans cette course vers on ne sait plus trop quoi. L’état modifié de conscience, c’est un espace de conscience. Et il est souhaitable et guérissant, il nous relie. C’est l’énergie du cœur qui prend toute sa place et qui nous fait réaliser que nous ne sommes pas séparés. Cette union, cette unité avec tout ce qui nous entoure, si nous prenons le temps de vraiment écouter l’oiseau. Et c’est facile à faire comme expérience, il suffit d’aller s’asseoir dehors sur un banc et de simplement écouter l’oiseau et de recevoir le chant de l’oiseau dans notre cœur, de l’entendre et d’entendre la vibration et son message qui nous parle d’amour. Il célèbre la vie et il est là pour nous dire : chante-toi aussi, sois heureux. Alors que nous sommes souvent dans cet enfermement, dans cette coquille qui nous empêche de nous relier aux choses simples de la vie. L’état modifié de conscience, c’est la beauté pure, mais qui est aussi dans la laideur. Cette capacité de voir même à travers la laideur, même à travers l’horreur. Cette capacité de voir la beauté, pas seulement dans un bel environnement.

Il ne peut pas y avoir de démarche spirituelle qui renie le corps. Ce serait une aberration, ce serait comme rejeter quelque chose qui est à l’essence même de la vie. Car nous naissons d’une cellule masculine et féminine. Nous naissons de cette union. Et comment se fait-il que souvent la sexualité soit un péché ? Et pourquoi cela devrait-il être réprimé ? Le Tantra n’a simplement pas de tabou à cet endroit.